inventaire participatif

La région parisienne est un lieu exceptionnel.
Très peu de territoires au monde profitent d’une pareille diversité culturelle : New York, Londres, Berlin, peut-être. Les rues sont pleines de visages venus des quatre coins de la planète, tant de regards qui se croisent quotidiennement  devant nos yeux.
Nous pourrions élaborer un inventaire mondial des traditions, seulement en arrêtant ces passants et en les questionnant sur leur patrimoine culturel immatériel.

Ce n’est, cependant, pas si évident. Nous savons, en tant qu’individu issu d’un groupe culturel, qu’il faut respecter un certain protocole pour nous approcher. Ces codes, coutumes, habitudes, sont connus par les membres d’une même communauté, mais dans la majorité des cas seront méconnus des autres. Nous affrontons la première difficulté majeure de notre tache : explorer l’intérieur de l’homme sans savoir comment y entrer.

Pour apprendre comment y entrer, rien de mieux que de se faire accompagner par quelqu’un qui connaît les règles, c’est ce qu’on appelle un passeur. D’après le dictionnaire, l’une des significations de passeur est : « Une personne permettant à des clandestins de franchir une frontière ». Nous sommes des clandestins, nous voulons franchir toutes les frontières.

Nous recherchons des passeurs.
Vous appartenez à une communauté culturelle ? Vous êtes membre d’une association de  valorisation d’identité culturelle ? Vous connaissez bien une autre culture différente de la vôtre ? Vous voulez collaborer avec nous ? Alors devenez passeur interculturel. Une fois passée la frontière, notre chemin nous amènera à la recherche de deux types de personnes : des informateurs et des porteurs de tradition.
L’informateur peut connaître une tradition sans en être un spécialiste, un « maître », il est capable de nous informer sur une pratique concrète et nous aider à rencontrer un porteur.
Par exemple, un informateur peut différencier un bon guitariste flamenco d’un autre qui ne l’est pas, en revanche, il n’a pas le talent ou n’a pas eu la formation adéquate pour devenir un  guitariste.

Le porteur est celui à qui on a  transmis une pratique traditionnelle. Il peut être un spécialiste, un maître, comme les maîtres d’art ou les compagnons en France, mais ça peut être également une grand-mère qui apprend à son petit-fils une recette de cuisine ; un professeur de danse traditionnelle qui assure des cours ; un conteur qui récite des mythes antiques aux enfants ; l’artisan qui enseigne des techniques ancestrales à son apprenti, celui qui s’engage dans l’organisation d’une célébration festive qu’il connait très bien.

Les porteurs pourront nous aider à dresser l’inventaire de leur pratique, nous voulons les interviewer, enregistrer leurs témoignages, leurs musiques, leurs techniques culinaires…Nous souhaitons savoir comment ils ont acquis ces pratiques et comment-il envisage la transmission de cette richesse, élaborée au fil des années par l’intelligence collective de leur communauté.

Cette richesse, cette intelligence collective dont nous parlons, sont le patrimoine culturel immatériel. Immatériel puisque le sujet de notre démarche est plutôt intangible, il s’agit de la transmission et non de l’objet produit, même si cela nous intéresse. La parole est le vecteur majeur de ce processus d’apprentissage des traditions et pour autant c’est quelque chose d’aérien. Pour matérialiser cette notion si impalpable, nous allons nous laisser guider, encore une fois, à l’heure de préparer notre recherche, par la classification que propose l’article n°2 de la Convention 2003 UNESCO pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel:

A) les traditions et expressions orales
B) les arts du spectacle
C) les pratiques sociales, rituels et événements festifs
D) les connaissances et pratiques concernant la nature et l’univers
E) les savoir-faire liés à l’artisanat traditionnel.

Ces cinq domaines proposés par l’UNESCO se divisent en sous-domaines, par exemple, les arts du spectacle englobent des pratiques telles que la musique, les chants, le théâtre, la pantomime, la danse etc.